Mondial femmes
Baiser forcé et prise de couilles ou magie du foot ?
Qu’avez-vous retenu du Mondial féminin de foot ? Si vous suivez aveuglément la plupart des médias (ce que je vous déconseille fortement) vous n’avez pas pu échapper au comportement de Luis Rubiales, président de la fédération espagnole de football, infligeant à Jenni Hermoso, capitaine de l’équipe d’Espagne victorieuse, un baiser forcé lors de la cérémonie de clôture. Il s’est aussi distingué (?) en se prenant les couilles à pleine main après le but espagnol et ceci aux côtés de représentantes de la famille royale d’Espagne...
Bien au-delà d'un "baiser" forcé...
Cette déplorable histoire à la «
Balance ton porc
» va bien plus loin que
me-too et son contexte. Elle nous dit beaucoup sur ce qu’est devenu le foot aujourd’hui. Les gestes de cet horrible machiste sont lamentables et condamnables. Mais la question est : « Et l’équipe d’Espagne de football, où est-elle pendant ce temps ? ». On ne peut pas dire que cette merveilleuse formation ait eu droit aux hommages et à l’attention qu’elle a largement mérités. C’est toujours la même histoire : en matière d’info (?!) c’est le plus hideux et sinistre qui l’emporte sur le reste. Or cette équipe-là (en pleine crise interne au demeurant) a fait une démonstration extraordinaire de jeu de football; ça n’intéresse personne ? Si ? Alors dites-le !
Le
Tiki Taka, vous connaissez ? C’est l’Espagne de Guardiola, ça… Se passer indéfiniment la balle, priver totalement l’adversaire de ballon et affoler les statistiques jusqu’à ce que le téléspectateur s’endorme. Est-ce encore du foot ? Pour leur premier match de ce Mondial, les Espagnoles nous ont livré une version minable de ce
Tiki Taka,
et se sont fait laminer par de fantastiques Japonaises
(4-0 !). Il y a plein d’enseignements à tirer de ce match, mais on n’en a pas beaucoup lu… Pourtant, c’est du football et du plus passionnant ! En deux mots : les Ibériques ont ânonné un Tiki Taka de troisième zone avant de se faire cueillir par des
Japonaises en pleine euphorie sur des contres diaboliques : cinq tirs cadrés, quatre buts, qui dit mieux ?
Eblouissantes Japonaises
Le
Japon, qui aurait pu (et dû ?) gagner cette Coupe du monde, a fait au monde entier une éblouissante démonstration de ce que sont des
contre-attaques foudroyantes et surtout de ce que c’est que de
tirer au but
en football, le tout
en mouvement, dans le tempo et parfaitement exécuté. L’incroyable précision des tirs nippons a éclairé ce match comme c’est rarement le cas.
Les footballeurs professionnels hommes (français entre autres, mais pas seulement), devraient se repasser encore et encore ce Japon-Espagne pour comprendre comment on gagne sans avoir la balle, ou presque : en contre-attaquant et en tirant avec une précision d’horloger. Les Espagnoles ont été ce jour-là ridiculisées par une équipe qu’elles « dominaient » en
possession de balle, à n’en plus finir. Mais pour quoi faire ? En quatre coups de patte, le Japon a mis en pièces leur système.
Le plus intéressant peut-être est que, d’un match à l’autre, les Espagnoles ont magistralement compris la leçon… pour finalement devenir championnes du monde ! Loin devant l’épisode
Hermoso-Rubiales
et le sinistre baiser forcé, c’est ça qui m’intéresse, moi :
Comment une équipe prisonnière d’un système poussé à sa caricature (le Tiki Taka à son pire) parvient à intégrer et corriger en quelques jours tout ce qui ne va pas et termine vainqueur d’une Coupe du monde; ça c’est de l’info ! Mais ces analyses-là, où les a-t-on lues ? Du baiser forcé en veux-tu en voilà, mais sur cette métamorphose sublime, que dalle ou presque.
Amoureux du foot réveillez-vous ! Je n’arrête pas de le dire ici : sur Twitter, vous êtes nuls (à part quelques-uns comme Matthias, Raphael, Nicolas, Jean-Baptiste, Jérôme, et une poignée d’autres : pardon à eux) . Ce n’est que du bla bla, des vidéos rigolotes ou humiliantes, quelques belles actions -quand même !-, le mercato, des rumeurs, le chien de la journaliste, le chat du commentateur ; bref : où est le foot ?
Le foot crève d'un manque de beauté
Parler de ce qui compte vraiment, voilà ce qui est beau : l’avenir du foot, le jeu, les dégâts de la VAR et de la FIFA… Ce qu’a fait cette
Roja pour finalement devenir championne est une merveille. Elle a transformé en deux temps trois mouvements son impuissance complète face au Japon en un collectif magnifique et irrésistible. Comment ? En donnant au Tiki Taka la vitesse qu’il n’avait pas et en assommant les Anglaises par la précision de leur jeu en triangle. La porteuse de la balle redevenait alors la maîtresse du jeu, entourée de co-équipières virevoltantes. La
mutation foudroyante d’une équipe à genoux lors de son premier match et devenue triomphante, voilà un sujet !
Alors maintenant, quelle que soit la très réelle importance de ses méfaits -qui ne doivent pas rester impunis !- laissons ce pauvre
Rubiales avec son
machisme et sa paire de couilles. Parlons de ce qui compte !! Le football souffre d’un grave
déficit de beauté. Allons vers ce qui est beau…
Photo : Geralt, Pixabay