
Le format de Twitter fabrique-t-il des analphabètes ?
Depuis novembre 2021 je suis sur Twitter, plutôt contraint, il faut le dire : ma méfiance était grande en effet envers les
réseaux sociaux. Mais enfin, ayant créé, non sans mal sur le plan technique, un site Internet intitulé « Les médias
et le sport
», il me fallait bien essayer de le faire connaître...
Écrire c’est bien, être lu ce n’est pas mal non plus… Surtout quand on a comme moi les convictions et la croyance, sans doute naïve, que l’on peut encore
sauver le sport, notamment
le foot, sport-roi selon moi et des millions d’autres, d’une dégénérescence fatale.
Je publie donc régulièrement sur mon site -pas assez mais à peu près toutes les trois semaines en moyenne- des textes tentant de susciter une réflexion sur le sport et de nous rendre tous un peu moins abrutis face à ce phénomène aussi massif, populaire que problématique.
Un premier bilan nul
Disons-le : à ce jour,
Twitter est pour moi un échec cuisant et mon site ne vaut guère mieux. Pourquoi ?
« Les médias et le sport »
est pourtant, à ma connaissance, le seul
site omnisports proposant une vision critique sur le sport et essayant de titiller le goût supposé de l’être humain pour les questions, les
énigmes et les réponses qu’on peut leur apporter.
Depuis six mois, chaque fois que j’ai publié un texte sur mon site, j’en ai informé
la communauté des twittos
en joignant le lien vers l’article. Le résultat de ces efforts est nul. Aurais-je dansé à poil sur la table de ma cuisine que j’aurais sans doute récolté plus de
retweets qu’avec mes textes. Les adeptes de Twitter seraient-ils
analphabètes, ou plutôt
le format de Twitter les rendrait-il quasi analphabètes ? Ecrire des messages de deux-cent quatre-vingts signes ne nous rend-il pas tous frappadingues et en tout cas guère capables de lire plus long ?
Quand le format emporte tout…
La question est rude mais incontournable. On peut me répondre que Twitter est Twitter et que le réseau obéit à
une logique formelle bien définie, à laquelle il faut impérativement se plier pour espérer obtenir quelques
cœurs,
commentaires et
retweets. A l’évidence je ne corresponds pas du tout à ce format.
Mais que reste-t-il alors comme moyen de communication à quelqu’un qui a des choses à dire et tente de faire passer un peu de sens -je publie sur foot, télévision et arbitrage vidéo depuis 1996 -pour se faire entendre ? L’accès à
la presse écrite rétrécit a vue d’œil (ma dernière publication dans
Libération, qui me publiait auparavant volontiers, remonte à 2019) et une large partie de cette presse ne veut rien connaître en dehors des textes de pointures médiatiques consacrées, type Finkielkraut-Attali, à qui la soupe est inlassablement servie. Ainsi honte au
Figaro, le pire de tous. Alors où pouvoir diffuser ses idées, hormis par la recherche harassante d’éditeurs de
livres (j’en ai publié deux et en ai deux autres tout prêts) ?
Il reste maintenant à savoir
ce qui marche sur Twitter et ce qui pourrait attirer l’attention de quelques membres de cette communauté sur un peu de
réflexion et de
différence. Après six mois de Twitter, il est trop tôt pour me faire un jugement précis et mes limites techniques de senior appliqué mais sur ce plan très moyennement performant explique aussi mon échec actuel.
Twitter : des images et du plaisir
Je hasarderai néanmoins le premier bilan suivant :
-une ou des
images, notamment une vidéo attireront toujours bien plus qu’un texte de 3000 à 8000 signes en pièce jointe. Et ce, même agrémenté d’une photo...
-le
plaisir reste la motivation de base : une
photo, une
vidéo, un texte bourré d’emojis a toutes les chances de faire sourire, voire votre chat accroupi sur la cuvette des WC. Face à ça, un texte sur l’avenir du foot ne pèse pas lourd.
Aucun
internaute et
twitto ou presque ne me connaît, mais même certains auteurs confirmés par ailleurs et constamment présents sur Twitter ne recueillent que relativement peu d’écho.
En somme, plus c’est gros, plus ça passe. Certain(e)s
journalistes de sport y aiment au moins autant mettre en scène leur toutou et les parasols de leurs vacances que de nous livrer une réflexion ou un vrai commentaire. Le toutou cartonne et il récolte des centaines de « j’aime ».
Ceci n’est que le
bilan d’étape d’un twitto déçu mais pas vraiment surpris. Je m’attendais en fait à quelques débordements d’aigreur, voire de haine, plutôt qu’à cette
indifférence glacée. Non, c’est plutôt l’ampleur du désastre qui désarçonne et étonne, quand on a zéro retweet et zéro « j’aime » pour des textes qui ont demandé un réel travail. Ma technique et mon savoir-faire ne sont certes pas encore au point mais n’avoir que cinq
abonnés -dont ma compagne- et cinq
abonnements après six mois d’efforts, cela laisse songeur. Qu’en pensez-vous, « amis » ?
21 mai 2022